L’étude des points craniométriques et des lignes de force de la tête osseuse présente un intérêt majeur en ostéopathie crânienne pour de nombreuses raisons.

L’étude des points craniométriques et des lignes de force de la tête osseuse présente un intérêt majeur en ostéopathie crânienne pour de nombreuses raisons.
• Points anatomiques remarquables.
• Points de repère précis pour les tests ostéopathiques.
• Points clés pour l’alignement des structures à corriger.
• Points d’acupuncture importants[1].
[1] Pour le lecteur intéressé par la correspondance entre les points craniométriques et le points d’acupuncture, nous renvoyons à notre dernier ouvrage : Le Lien Mécanique Ostéopathique, Evolution et perspectives, Editions Sully 2024.
Les points craniométriques, pour la majorité d’entre eux présentés en 1875 par Paul Broca[1] à la Société d’anthropologie de Paris[2], ont été adoptés par la communauté scientifique comme des points de repère commode pour l’ostéologie du crâne. Pour leur appellation, le choix préférentiel du grec évite toute confusion avec la nomenclature latine en vigueur pour l’anatomie. Les points craniométriques se sont avérés repérables de manière fiable par IRM cérébrale[3]. En nommant de façon claire et concise les principaux repères morphologiques de la tête osseuse, ils nous affranchissent d’une description anatomique trop longue.
Nous décrivons ici les principaux points craniométriques qui, dans la méthodologie du Lien Mécanique Ostéopathique (LMO), servent de référence pour un grand nombre de tests.
[1] P. Broca, 1824-1880, médecin chirurgien, anatomiste et anthropologue français. Son nom reste attaché à la découverte du centre de la parole dans le cerveau (aire de Broca).
[2] Paul Broca. Instructions craniométriques. Notions complémentaires sur l'ostéologie du crâne. Détermination et dénomination nouvelles de certains points de repère. Nomenclature craniologique.
Bulletins de la Société d'anthropologie de Paris, 1875, Volume 10 Numéro 1 (pp. 337-367)
[3] Repérage des points de craniométrie, des sutures crâniennes et des distances qui en découlent, par IRM. Journal de radiologie, Année 2004 Volume 85, Elsevier

Les principaux points craniométriques
1. Pogonion : du grec pogon signifiant barbe.
Point le plus en avant de la mandibule, à ne pas confondre avec gnathion le point le plus bas du menton, situé juste en dessous.
Point de contact pour le test de l’étage inférieur.
2. Prosthion: du grec prosthios signifiant le plus en avant.
Point le plus antérieur du processus alvéolaire maxillaire, à la jonction du philtrum et du maxillaire.
Point de contact pour le test de l’étage moyen.
3. Acanthion : du grec akantha signifiant épine. La forme de l’épine nasale antérieure évoque celle d’une feuille d’acanthe comme celles ornant les chapiteaux corinthiens.
Point à l’extrémité de l’épine nasale antérieure.
Point de contact pour le test de l’épine nasale et du vomer.
4. Glabelle : du latin glabellus qui signifie sans poils.
Point le plus antérieur de l’os frontal correspondant à la saillie lisse entre la crête des sourcils.
Point de contact pour le test de l’étage supérieur et la poutre antéro-postérieure de la base du crâne.
5. Metopion : du grec ancien metôp signifiant front.
Point entre les bosses frontales, à partir duquel le front part en arrière.
Ce point est situé juste au-dessus d’une dépression correspondant au point ophryon (du grec ophrus qui veut dire sourcil).
Point de contact pour le test de la faux du cerveau.
6. Bregma : mot dérivé du grec brecho signifiant humecter car, chez les nouveau-nés, la fontanelle antérieure est une zone molle et humide. Bregma était l’ancien nom de l’os pariétal.
Point précis de la rencontre de la suture sagittale et des sutures coronales lorsque la fontanelle antérieure n’existe plus[1].
Point de contact pour le test de la suture sagittale avec la suture coronale.
7. Vertex : du latin vertex signifiant sommet.
Point de la suture sagittale géométriquement déterminé à la verticale de porion comme le point le plus haut du crâne.
Point de contact pour le test du pariétal moyen.
8. Obelion : mot dérivé du grec ancien obelós qui signifie pointe, pique.
Point correspondant à la pointe de la fontanelle postérieure dite lambdoïde (nom grec de la suture sagittale).
Première zone d’ossification de la suture sagittale avec, sur quelques centimètres, une suture non pas dentelée mais lisse et présentant de chaque côté un trou pariétal.
Point postérieur de la ceinture de la calvaria. Correspond au centre de la tonsure des moines catholiques.
Point de contact pour le test du pariétal postérieur.
9. Lambda : nom de la lettre grecque Λ (lambda majuscule) dont la pointe occipitale imite la forme. Point précis de la rencontre de la suture sagittale et des sutures lambdoïdes lorsque la fontanelle postérieure n’existe plus.
Point de contact pour le test de la suture lambdoïde.
10. Inion : Du grec inion signifiant nuque.
Point correspondant à la protubérance externe occipitale même si le relief osseux descend parfois plus bas que l’inion géométrique.
Point de contact pour les membranes de tension réciproques et le confluent des sinus veineux.
[1] Chez le nouveau-né, le testing à ce niveau doit être adapté. Il faut impérativement rester sur la berge des os frontaux et pariétaux pour éviter tout appui sur la fontanelle.
11. Mastoidale : du grec mastoeidês signifiant en forme de sein.
Point correspondant à la pointe du processus mastoïde.
Point de contact pour le test de la tente de cervelet, l’équilibre postural (ligne bimastoïdienne) et la sortie crânienne du nerf vague.
12. Gonion: du grec gonion qui signifie angle, étymologie que l’on retrouve avec le mot goniomètre.
Point correspondant à l’angle entre le corps et la branche de la mandibule.
Point de contact pour le test de la mandibule.
13. Dacryon: du grec dakruon qui signifie larme.
Point situé à la convergence de l’os frontal, de l’os lacrymal et de l’os maxillaire.
Point de contact pour le test des masses latérales de l’os ethmoïde et le ligament palpébral médial.
14. Orbitale: dérivé du latin orbita qui veut dire ornière, trace d’une roue. Point le plus bas du bord orbitaire inférieur qui détermine le plan horizontal de Francfort.
Point de contact pour le test de l’os zygomatique.
15. Porion : du grec poros signifiant passage, conduit et qui a donné pore, porosité.
Point le plus haut et le plus en avant du conduit auditif externe et déterminant le plan horizontal de Francfort.
Point de contact pour le test de l’os tympanal.
16. Stephanion : du grec ancien stephanion qui veut dire couronne[1].
Point qui correspond à l’intersection de la suture coronale et de la ligne courbe temporale supérieure.
Point pivot où s’effectue le changement de direction des biseaux de la suture coronale.
Point de contact pour le test de la suture coronale.
17. Ptérion : du grec pteron qui signifie aile[2].
Point de rencontre des sutures du frontal, du temporal, de la grande aile du sphénoïde (ce qui lui a donné son nom) et du pariétal, le tout formant une structure en forme de H.
Point de contact pour le test du sphénoïde et du pariétal antérieur.
18. Asterion : du grec asterion qui signifie petite étoile, du fait des 3 branches (sutures) qui partent de ce point.
Point de jonction des trois os occipital, pariétal et mastoïde.
Point de contact pour le test du pariétal postérieur.
19. Eurion : ou euryon, du grec eurys qui veut dire large puisque la distance entre les deux points eurion donne le diamètre bipariétal (largeur du crâne).
Point de la proéminence pariétale et point le plus latéral de la calvaria.
Point de contact pour le test des bosses pariétales.
[1] En référence à la couronne des martyrs, saint Stéphane (Etienne) étant le premier martyr chrétien.
[2] De là le nom bien connu du reptile volant préhistorique, le ptérodactyle.
Il y existe un point céphalométrique très particulier car non visible et non palpable : le point odontoidale[1]. Ce point remarquable correspond au sommet de la dent de l’axis (apophyse odontoïde) et se situe à l’intersection des grandes lignes géométriques du crâne.
[1] Dans la plupart des radiographies de la zone craniofaciale (céphalogramme), le point odontoidale est assimilé au point basion, point le plus inférieur et le plus antérieur du foramen magnum, situé juste au-dessus de la pointe de l’odontoïde.

Les lignes craniométriques et leur convergence vers le point odontoidale
1. La ligne antéro-postérieure de Mac Gregor qui va du palais osseux au point déclive de l'occiput. On retrouve dans ce plan horizontal les points Acanthion, Odontoidale et Mastoidale.
2. La ligne oblique de Wackenheim qui va de la selle dorsale du sphénoïde à la partie basilaire de l'occiput. On retrouve dans ce plan oblique les points Stephanion et Odontoidale.
3. La ligne verticale qui va du sommet de la tête à la dent de l’axis. On retrouve dans ce plan frontal les points Vertex, Porion et Odontoidale et aussi Mastoidale.
4. La ligne transverse bimastoïdienne qui relie dans le plan frontal les deux points Mastoidale en passant par le point Odontoidale.

Le point odontoidale, au centre de la jonction cranio-cervicale
Nous avons déjà présenté les lignes de force et l’architecture de la tête osseuse dans un ouvrage précédent[1].
1. Les poutres, lignes horizontales qui soutiennent le plancher crânien.
2. Les piliers, lignes verticales qui renforcent latéralement le crâne.
3. Les arcs, ligne courbes qui relient les piliers entre eux.
4. La ceinture, ligne circulaire qui chaine la base de la coupole
Précisons ici que toutes ces lignes passent par des points craniométriques précis.
Le traitement combiné de deux points se situant sur une même ligne de force permet ainsi de relâcher les contraintes intra-osseuses et toutes les dysfonctions crâniennes qui peuvent en résulter[2].
[1] P. Chauffour, E. Prat, J. Michaud, Le Lien Mécanique Ostéopathique : lésions ostéopathiques de l’os, Editions Sully, 2012
[2] Ce traitement structurel des lignes de force améliore grandement la flexibilité du crâne et les mouvements idéomoteurs perçus par les mains de l’ostéopathe.

Les lignes de force de la tête osseuse.
Avec la méthodologie du LMO, nous abordons le crâne en trois étapes successives.
1. Le testing individuel de chaque point avec un test de mise en tension tissulaire pour le diagnostic rapide et précis des lésions ostéopathiques présentes. L’examen complet du crâne ne demande ainsi que quelques minutes.
2. La détermination des points à traiter avec le test en balance inhibitrice pour identifier la lésion dominante du crâne.
3. L’ajustement spécifique du point en lésion avec le recoil qui permet d’obtenir une correction immédiate des différentes fixations trouvées. Cet ajustement peut porter soit sur un seul point, soit sur deux points ensemble (traitement combiné).
Traitement combiné points acanthion et glabelle (septum nasal)
La combinaison de ces trois techniques (test en tension, test en balance et recoil) sur les points clés de la tête osseuse est un mode opératoire non seulement original mais aussi simple et rapide à mettre en place. Un avantage non négligeable pour inclure facilement le crâne dans la durée d’une consultation ostéopathique normale.
Cette approche pourra être complétée par celle des artères cérébrales, des nerfs crâniens, de l’encéphale et des muscles peauciers du visage pour avoir un traitement complet de la tête.
Sans oublier de remettre la tête dans le contexte de la lésion totale puisque, par l’intermédiaire entre autres des fascias neuro-méningés, le crâne est en relation directe avec le rachis, le périphérique et les autres unités fonctionnelles du corps.
Eric Prat, Ostéopathe DO
Illustrations Sarah Stringhetta